TOP BD Manga du mois de janvier 2024
Dans le but de mettre en avant notre rayon BD/Manga, un rayon riche en récits puissants abordant tout un tas de thématiques, je vous concocterai chaque mois un "top" de mes lectures de ce rayon. Le but n'est pas de les classer mais simplement de vous proposer quelques titres qui m'auront particulièrement marqué chaque mois. Une sélection qui ne limitera pas aux seules nouveautés !
Bien évidemment, n'hésitez pas à donner vos avis et à recommander d'autres titres.
Les rééditions
A la suite de la réédition récente de l’œuvre incontournable de Moto Hagio Le clan des Poe chez Akata (terminée en deux tomes) ; les éditions Glénat ont réédité à leur tour les deux anthologies de la mangaka de talent : De l'humain et De la rêverie. Quelle claque ! Ces textes écrits entre les années 70 et 90 pour les plus tardifs sont d'une grande originalité d'autant plus au vu de leur date de parution. Moto Hagio y explore les questions de genre, les relations familiales complexes, l'alter ego, l'humanité et la place que nous prenons dans l'univers avec une justesse novatrice. Ces deux titres sont pour moi un immense coup de cœur ! Quant aux dessins, qui correspondent à la période, ils sont efficaces et rajoutent à l'émotion de certaines des nouvelles. L'émotion que la mangaka réussit à transmettre à travers les yeux de ses personnages est extraordinaire.
Les éditions Kana nous font le plaisir de rééditer le travail subtil et touchant de Fumiyo Kouno. En août dernier, j'avais été chamboulée par Le pays des cerisiers, où l'autrice raconte avec une justesse déchirante les traumatismes causés par les bombes nucléaires qui frappèrent Hiroshima et Nagasaki en 1945. Dans un recoin de ce monde, son œuvre la plus connue, adaptée en film d'animation en 2016, était donc l'une des sorties que j'attendais avec impatience. Fumiyo Kouno y raconte le quotidien de Suzu, jeune femme japonaise pendant la guerre du Pacifique. Malgré le conflit, les pénuries et la pauvreté qui s'installent, Suzu garde le moral et se réjouit des petites réussites journalières. L'humour est d'ailleurs omniprésent dans la narration. Passionnée de dessin, cette activité lui permet de continuer à trouver de l'espoir dans la beauté de ce qui l'entoure...jusqu'au terrible jour du 6 août 1945. La mangaka raconte avec beaucoup de respect et d'empathie la vie de la population lambda coincée dans l'Histoire, dont les vies furent brisées à jamais, sous le feu et la cendre des bombes atomiques. Fumiyo Kouno rend ici hommage à Hiroshima, la ville qui l'a vu naître et à ses habitants.
Continuons avec Cocon, de Machiko Kyô, une œuvre pour laquelle la mangaka s'est inspirée de l'enrôlement de jeunes filles comme infirmières à Okinawa pendant la Seconde Guerre mondiale. Ce manga ne peut laisser de marbre tant l’innocence de ses jeunes filles s'effritant au contact des horreurs qu'elles traversent est bouleversant. Le dessin sort de l'ordinaire et tout comme ces jeunes filles, tremblantes devant les morts et la destruction, le dessin donne l'impression de vaciller, de flotter. Là encore, un coup de cœur, véritable plaidoyer contre l'absurdité des guerres dans lesquelles ne ressort jamais ni gagnant, ni perdant.
Land de Kazumi Yamashita, complet en 11 tomes au Japon est très enthousiasmant. Dans un monde bien mystérieux où les habitants ne peuvent pas vivre au-delà de 50 ans et où quatre "kamis" règnent sur la vallée, nous suivons la jeune Ann. Confrontée à des événements curieux, elle commence à s'interroger sur le fonctionnement de son monde, malgré la peur que lui insuffle la présence menaçante des quatre dieux. Malgré cela, sa curiosité la pousse toujours plus près des limites. La mangaka réussit à nous embarquer grâce à des dessins sublimes, à un personnage principal faisant preuve d'une lucidité lumineuse et à une intrigue prenante.
Vous aurez peut-être reconnu les dessins de Welcome Back, Alice ? Nous devons cette série, terminée en 7 tomes au Japon, à Ôshimizu Shûzô, qui n'est autre que l'auteur des Liens du Sang. Le peu de dialogues, les expressions précises qu'arborent ses personnages et l'étrangeté qu'il réussit à composer en peu de pages sont impressionnants. Dans cette série, il questionne frontalement le rapport au genre et à la virilité grâce à l'histoire de Yôhei, un lycéen ayant développé une grande attirance depuis le collège pour sa camarade Yui. Au moment d'entrer au lycée, une mystérieuse adolescente le surprend par son parlé cru et sa franchise. Elle dit être Kei, ancien camarade de classe au collège avec lequel Yôhei s'était brouillé. Commence alors une relation à trois étrange, mettant à mal les bienséances enseignées par la société japonaise. Attention, ce manga contient plusieurs scènes de masturbation.
Un second au revoir, de Takogawa Takomaru, est un thriller fantastique, dont la publication est toujours en cours au Japon. Hinata Harusawa apprend que le corps de son meilleur ami, Sora Otonashi, disparut lorsqu’ils étaient en deuxième année de lycée, a été retrouvé. Persuadé qu'il était parti à la découverte du monde, le choc est immense. Pendant la cérémonie, Hinata revoit chacun des anciens élèves du club d'Art du lycée. L'un d'eux remarque une chose étrange sur la dernière toile peinte par Sora...et se fait brutalement attaquer par un inconnu vêtu de noir. Alors qu'Hinata trouve le corps de son ancien camarade, il se fait lui aussi attaqué par surprise. Il se retrouve transporté au lycée, des années plus tôt, quelques mois avant la disparition de Sora. Pourra-t-il modifier le présent et sauver ses camarades ?
L'intrigue est menée efficacement et le doute sur la réalité des événements reste entier. La construction du premier tome est relativement classique, les soupçons d'Hinata se portant alternativement sur chaque personnage. Néanmoins, l'histoire est prenante et il est agréable de faire ses propres hypothèses sur l'identité du coupable !
Pour un public plus jeune (dès 8 ans), j'ai été très agréablement surprise par Shiita et la forêt des minuscules de Kamba Yûki, dans lequel nous suivons le jeune Shiita qui vit paisiblement dans sa colonie d'accueil depuis quelques années. Un jour, son ami Nara disparaît, en quête de grandes aventures. Seulement, pour les minuscules, la forêt est un endroit sauvage et dangereux. Shiita se lance sur les traces de son ami, bien décidé à le trouver avant qu'un malheur ne lui arrive. Cette courte série, terminée en 3 tomes possède une dynamique efficace grâce aux rebondissements nombreux et aux personnages farfelus et attachants.
Les suites de série
Le gros chat et la sorcière grincheuse, de Kachiwaba Hiro, continue à surprendre positivement avec ce tome 3. Cet isekai fonctionne principalement grâce à son originalité. Ici, pas d'être humain invoqué dans un monde de fantasy médiévale mais plutôt un chat, qui plus est, immense par rapport à notre échelle humaine. Il se retrouve bien malgré lui au milieu d'anciens conflits qui le dépassent. Il n'a qu'une envie : prendre soin de sa nouvelle maîtresse, la mystérieuse Jeanne. Une femme âgée se cachant dans la forêt, dissimulant son passé aux habitants du royaume voisin..La fin approche, puisque la série se termine en 5 volumes.
Enfin, c'est le tome 4 d'Hirayasumi qui clôture ce premier top manga/bd. Shinzo Keigo continue de nous raconter la vie tranquille de Hiroto, de sa cousine et de toutes les personnes qui les entourent avec le talent discret placé dans les détails, les regards, l'émotion transmise par la lumière. Un nouveau tome aussi lumineux que les précédents. Je le certifie, ce manga est encore plus efficace qu'un bon câlin.