Cette sélection a pour but de vous faire découvrir le Sri Lanka à travers sa production littéraire. Vous y trouverez donc les ouvrages d'auteurs srilankais mais aussi d'auteurs d'origine srilankaise. Seuls les livres encore disponibles chez les éditeurs sont indiqués, cette liste est bien sûr vouée à évoluer au gré des parutions et de mes lectures.

Friday&Friday d'Anthony Jesuthasan
Dans ce recueil de six nouvelles, l'auteur évoque différents thèmes tels que l'histoire du Sri Lanka et particulièrement la guerre civile qu'a connue ce pays, les différents groupes de mouvements de libération qu'il y a pu avoir, des histoires de mort, de peur. Dans la plupart des nouvelles, on sent l'ironie qui tinte derrière les propos de l'auteur quand il évoque certaines actions absurdes. J'aime sa manière d'interpeller le lecteur, cela rend le récit plus vivant. J'ai apprécié découvrir la plume de cet auteur, certaines nouvelles m'ont marqué plus que d'autres comme Layla ou Friday, et Le chevalier de Kandi m'a bien fait rire. Ce recueil m'a clairement donné envie de lire ses romans !! J'ai donc commencé son dernier roman paru en août Salamalecs (pour lequel l'auteur viendra rencontrer ses lecteurs à la librairie le 26 septembre à 18h). Salamalecs est très original de par sa construction narrative : notre lecture du roman se fait par deux entrées, symbolisant la double identité, double histoire de notre protagoniste principal. D'un côté, un jeune Nandan qui tente de survivre dans un Sri Lanka déchiré par la guerre civile, et qui, poussé par l'envie de vivre, sera prêt à tout pour quitter son pays. De l'autre côté, un Nandan plus âgé, usé par la vie, par les gens, par l'administration française, qui se remémore son passé. Le récit interroge sur l'écriture de sa propre histoire, sur la vérité d'un récit qu'on se narre à soi et aux autres.

Dans la nuit solitaire de V. V. Ganeshananthan
Sri Lanka, dans les années 80, sur les traces de Sashi, et de sa famille. Sashi a toujours voulu être médecin, et elle est en admiration devant son frère aîné et son ami K, qui poursuivent le même rêve qu’elle. Seulement au début des années 80, de terribles émeutes, et massacres contre les Tamouls se produisent et Sashi voit son destin bouleversé comme celui de tant d’autres Srilankais. Nous allons la suivre pendant 8 ans et vivre à ses côtés l’histoire du Sri Lanka, les différentes phases de la guerre civile, la création du mouvement des Tigres Tamouls… Sa famille va peu à peu se retrouver imbriquée dans ce conflit, et être aux prises avec l’Histoire.
L’autrice nous interpelle de nombreuses fois dans ce roman, nous forçant à regarder en face ce qui arrive à ses nombreux personnages qui pourraient être nos frères, nos sœurs, nos parents, embourbés dans des conflits similaires à ceux dont on a connaissance aujourd’hui. Elle nous montre les choix impossibles auxquels ils font face, le déchirement que certains ressentent en se rendant compte qu’aucun des camps n’est parfait, mais qu’on leur demande toutefois de choisir et d’assumer toutes les conséquences qui s'ensuivront. Sashi ne veut pas prendre position pour l’un ou pour l’autre, elle veut être du côté de l’humain, aux côtés des victimes. Que faire quand on est ancré dans une terre, qu’on la voit se faire déchirer de toute part par ses propres habitants, qu’on veut s’enfuir, mais que tout nous ramène toujours à cette même terre et aux gens qui y habitent. 
C’est un récit bouleversant sur une partie de l’histoire du Sri Lanka et de ses habitants, sur la cruauté et l’absurdité de l’être humain, sur le pouvoir qu’ont certains leaders sur leur communauté, mais surtout et avant tout, une magnifique histoire d’amour et de famille.

Un passage vers le nord d'Anuk Arudpragasam :
Krishan travaille dans une ONG à Colombo, il tente d'aider les habitants à se remettre des traumatismes de la guerre civile. Le roman commence par un appel, où il apprend que Rani, la femme qui s'occupait de sa grand-mère est décédée. Cet appel est le début de divagations philosophiques, de retours dans le passé. Le souvenir de son ancienne amante, Anjum, revient le hanter. Il retrace leur histoire d'amour à l'aide de nombreux flashbacks. Il narre aussi l'histoire de Rani, cette femme tombée dans une profonde dépression après la perte de ces deux jeunes garçons. Ces deux figures féminines lui permettent d'exposer la série d'événements dramatiques qui a touché son pays durant la guerre civile, les graves traumatismes qui en ont découlés et les nouveaux défis qui attendent ce pays.
L'auteur a une écriture magnifique, simple mais qui décrit à merveille la psyché humaine, chaque réflexion, chaque parole de Krishan nous parle et on ne peut que se sentir proche de lui, se sentir compris. C'est un roman très contemplatif et introspectif.

Les Sept lunes de Maali Almeida est sans doute l'un des romans qui m'a le plus bluffé ces derniers temps. Les premières pages s'ouvrent sur le personnage de Maali, photographe de guerre, qui fait la queue dans un espace immaculé, un lieu céleste. Il comprend très vite qu'il est mort, et on va lui annoncer qu'il a 7 lunes pour découvrir ce qui lui est arrivé et révéler au grand jour des clichés de la plus haute importance, dont la publication pourrait changer le cours de la guerre civile ayant lieu à ce moment-là. A travers cette quête, Maali va vivre des aventures rocambolesques, nous entraînant à la rencontre de personnages hauts en couleur, de témoins de la guerre, nous immergeant dans la culture et le folklore srilankais. La verbe de l'auteur, son humour, sa manière de construire un récit dynamique et original font que le roman se lit d'une traite ! 

Bonnes découvertes !